Je n'ai plus de désir pour mon mari
3 questions à… Philippe Brenot, psychiatre, anthropologue et directeur d’enseignement en sexologie à Paris V. Il est l’auteur de nombreux ouvrages sur le couple et la sexualité dont Inventer le couple, Les Hommes, le sexe et l’amour et Les Femmes, le sexe et l’amour : 3000 femmes témoignent
Quelles sont les entraves à la sexualité masculine comme féminine ?
Philippe Brenot : La première c’est l’anxiété. Est-ce qu’un couple qui vit dans un pays en guerre va consulter parce qu’il souffre de pannes ? Non, car il va trouver ça normal. Si on est dans une situation de guerre interne avec soi même, des proches ou au travail, on risque d’avoir des difficultés sexuelles, des troubles du désir. La pression de l’anxiété est incompatible avec la sexualité.
Chez un homme, une goutte d’adrénaline fait chuter l’érection. Chez une femme, elle empêche la disponibilité sexuelle. Si on est préoccupé, il est difficile que le désir émerge puisqu’il se développe dans le cerveau, dans le cortex au même étage que le stress.
Pour dépasser cela, il va falloir apprendre à le laisser de côté, à s’abandonner, à trouver les bonnes conditions avec le partenaire. Si nécessaire, il faut consulter un médecin sexologue qui connaît la relaxation et qui peut aider à apprendre à s’abandonner. En cas de tensions trop importantes, la sexualité n’est pas possible.
Qu’en est-il de la baisse du sentiment amoureux ?
P. B. : Pour les femmes le contexte amoureux est plus important. Si le sentiment amoureux s’émousse, la sexualité va devenir moins possible. Souvent, dans une idéalisation de l’amour, une femme va être très déçue que la phase passionnelle ne soit plus la même. Pendant cette période il n’y a pas besoin de préliminaires, l’excitation est presque permanente. La femme va jouir très facilement.
Quand revient le quotidien, il y une déception car la femme n’est pas aussi disponible et donc, ne va pas jouir de la même façon. Il faut alors ranimer la flamme amoureuse.
Que se passe-t-il quand les attentes sexuelles ne sont pas les mêmes ?
P. B. : Il est important de dire que la sexualité n’est possible entre deux adultes que s’il n’y a aucune contrainte. La femme ou l’homme ne doivent pas faire des choses qui sont contraires à leur désir. Tout peut être vécu dans le couple, il n’y a pas de limites. La fellation, le cunnilingus ou la sodomie ne sont pas des pratiques perverses, si chacun y trouve son compte. S’il y a beaucoup de choses qui gênent pour l’un, ce peut être difficile.
La sexualité peut être librement vécu entre deux personnes si tout est possible, même si on ne fait pas tout. Même si ce n’est jamais vécu dans l’idée ce ne doit pas être impossible. Il ne faut jamais rien faire si on n’y prend pas de plaisir. Si on ne fait les choses que pour faire plaisir à l’autre, on va abîmer son désir et peu à peu on n’en aura plus.